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Être directrice, c’est être enthousiaste !

Comment se sentir à sa place et légitime lorsque l’on est une femme à un poste de direction, mais aussi plus largement lorsqu’on arrive dans une nouvelle entreprise, un nouveau secteur, une nouvelle culture organisationnelle ?  Souvent, la transition demande une bonne dose d’humilité, une vraie capacité à écouter ses équipes, mais aussi une grande part d’enthousiasme. 


Alexandra Serizay nous parler dans ce nouvel épisode du Pouvoir au Féminin de cette énergie qu’est l’enthousiasme, Un enthousiasme qu’elle a forgé et nourrit à travers un parcours aux trajectoires multiples, d'abord en audit interne chez France Télécom, puis en banque d'affaires chez Deutsche Bank, dans le conseil chez Bain, avant d'être directrice des opérations, puis directrice adjointe de la Banque de détail au sein d'HSBC France et enfin membre du COMEX, comme directrice stratégie, technologie et opération chez Sodexo, qu’elle a quitté récemment. 


Alexandra nous explique comment elle a navigué dans ces environnements différents, portée par l'enthousiasme donc, mais aussi par une grande capacité d’écoute et d’adaptation. Elle nous livre sa vision du pouvoir collégiale.


directrice enthousiaste

Passer de la stratégie à l’action


Pour Alexandra, le pouvoir c’est la capacité à mettre en œuvre des décisions et à avoir un impact tangible. En entreprise, cela implique de créer de la valeur, et donc d’agir sur ses différents leviers de création. Après des premiers postes en stratégie, elle passe donc côté opérations. 

“Passer de la stratégie à quelque chose qui est plus concret, c'est un travail d'équipe, c' est un travail très collaboratif et c' est une prise avec le réel. Lorsqu'on est en stratégie, on voit la vision, la ligne droite, et puis on est confronté à la réalité. Rien ne se passe jamais comme prévu, il peut y avoir des contraintes très concrètes, très tangibles, et donc l'enjeu, c' est de pouvoir mettre en place une stratégie sous contrainte et ça se fait évidemment jamais seul, ça se fait avec des équipes’. 

Le pouvoir d’action est donc toujours un pouvoir collectif, qui passe avant tout par un travail d’écoute active. Cela demande de comprendre les enjeux de ses équipes et de casser les éventuels silos pour que chacun puisse mettre ses compétences à contribution. On rompt ainsi avec la culture du héros pour s’adapter à la réalité du monde du travail actuel, caractérisée par une multitude d’expertises. 




L’enthousiasme comme force vive de la direction


Quel que soit l'intitulé de notre poste, on est dans une position de direction à partir du moment où l’on encadre des équipes. Pour Alexandra, l’enjeu n’a donc pas été de se sentir légitime à cette place, mais plutôt de diriger des équipes aux expertises très différentes des siennes. 


Pour donner une direction à des personnes qui maîtrisent mieux leurs propres fonctions, la capacité d’écoute devient encore plus stratégique. La directrice n’est donc pas forcément la personne sachante, mais celle capable de prendre du recul par rapport à ces nouvelles connaissances pour les remettre en perspective et donner la bonne direction. 


Les postes de direction demandent aussi de maîtriser une certaine ambivalence : entre diriger ses équipes et se mettre à leur service. 


“C'est là que tout le sujet du dialogue d'embarquer les équipes joue à plein. C'était dire que oui, on peut donner une direction, mais il faut embarquer les équipes et il y a le principe de réalité. D'où ce dialogue permanent, même pour donner la direction et définir une stratégie, ça se fait pas en chambre, en haut d'une tour. Il faut évidemment solliciter les différents marchés, leur propre situation, leurs propres enjeux, c'est presque de la co-construction. Maintenant, il faut trancher, et c'est la responsabilité de la direction”. 

Pour embarquer ses équipes, notamment dans des projets dont elles peuvent appréhender l’impact (parce qu’il est disruptif, comme l’adoption de l’IA par exemple), la directrice a plusieurs leviers à sa disposition : 


  • L’acculturation, qui passe par la formation, l’accompagnement du changement et dans la montée en compétence ; 

  • La preuve : donc commencer par une expérimentation pour démontrer la valeur du projet avant la mise à l’échelle ;

  • L'enthousiasme : cibler d’abord les zones anxiogènes pour apaiser les peurs qui sont légitimes avant d’embarquer ses équipes sur une vision plus positive. Dans le cas de l’IA, c’est ne pas nier que certains postes vont être supprimés, mais que d’autres opportunités vont également se créer. 


La direction implique donc d’embarquer ses équipes pour ne pas perdre de vue le cap que l’on s’est fixé. 



La symbiose entre vie professionnelle et vie privée


Mais cet enthousiasme ne se génère pas tout seul. Il demande beaucoup d’énergie, non seulement pour émerger, mais aussi pour le transmettre aux autres. Pour nourrir son enthousiasme, Alexandra veille donc à ne pas épuiser son énergie et à se ressourcer, notamment dans sa sphère privée. 


“Il faut avoir des portes de sortie, des passions pour pouvoir, j'en veux dire, regagner cette énergie qu'on donne. Donc ça peut être du sport, ça peut être de la lecture, ça peut être des promenades, ça peut être des moments familiaux. Ce rapport aux autres, c'est pour moi vraiment un vecteur de don d'énergie”. 

Alors que l’on parle beaucoup d’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle en termes d’impact de la première sur la seconde, on évoque peu le fait qu’avoir une vie intime riche nous donne aussi de l’énergie au travail. Cette richesse permet de prendre du recul, d’être plus efficace parce que l’on a pu compter sur un vrai sas de décompression. On voit ainsi de plus en plus d’employeurs valoriser cette capacité à se déconnecter et recharger ses batteries chez leurs équipes. Cela passe par exemple dans le fait de valoriser ses passions dans un CV. 


Pour Alexandra, l’expérience de la parentalité est aussi un plus dans la gestion d’équipe. Les enfants ont notamment une capacité d’écoute toute relative, ce qui peut nous apprendre à être plus convaincant, à mieux choisir ses batailles et à toujours maintenir le dialogue… Des compétences plus qu’utiles à des postes de managements ou de direction. 


DIRECTRICE

Trouver le bon équilibre entre humilité et légitimité


L’équilibre ne se construit pas qu’entre notre vie professionnelle et personnelle. Être directrice, c’est aussi trouver l’équilibre entre la légitimité nécessaire pour se sentir à sa place et embarquer ses équipes, et l’humilité indispensable pour choisir la bonne direction à prendre. 


Ayant beaucoup changé de secteur dans sa carrière, Alexandra a fait cette expérience de la découverte (de nouvelles problématiques, de cultures organisationnelles différentes) et de l’humilité face à la nouveauté. Cela demande une bonne capacité d’observation, de se mettre en retrait pendant les premiers mois pour comprendre quelles sont les valeurs (souvent tacites) du collectif que l’on va diriger. 


Mais cela implique aussi une certaine capacité à se sentir légitime en puisant dans ses expériences passées, toujours utiles dans un nouveau contexte.. Lorsqu’elles recrutent en externe, les organisations recherchent précisément cette capacité à challenger constructivement les manières de faire et y apporter un regard neuf.


Mais pour que cette légitimité soit perçue et acceptée par les équipes, il faut avoir rapidement de l’impact : “Il faut se dire à chaque fois qu'est-ce que je veux créer. What good looks like? Qu'est-ce qui va démontrer que j'apporte de la valeur ?”. 


Légitimité et humilité se nourrissent aussi. L’humilité facilite la découverte et l’assimilation de nouvelles connaissances qui permettent à une nouvelle directrice de mieux comprendre son environnement et d’entrer dans le concret : le jeu des contraintes (qu’elles soient budgétaires ou réglementaires, entre autres).  Et ce sont ces contraintes qui permettent de se surpasser, de grandir, et de se sentir pleinement légitime à son poste. 



Créer un écosystème naturellement sorore


Lorsque l’on est une femme dans le monde du travail, se sentir légitime passe aussi par le fait de voir d’autres femmes réussir et s’épanouir au sein de son organisation ou de son secteur. Pour Alexandra, la sororité est une dynamique qui s’est mise en place naturellement, à mesure que les entreprises ont nommé de plus en plus de femmes directrices et que liens se sont créés entre elles. 


Chez Bain, ces liens ont par exemple été encouragés en imposant la présence d’une autre femme lors des entretiens de recrutement. Cette normalisation du dialogue de femme à femme permettait non seulement d’éviter que les décisions ne soient biaisées, mais aussi de pouvoir mieux valoriser des profils qui ont tendance à moins se vendre que leurs collègues masculins.  


Finalement, pour arriver à une égalité homme/femme au travail, Alexandra estime qu’il faut parvenir à mieux valoriser et normaliser nos trajectoires et notre capacité à nous nourrir de cet équilibre entre légitimité et humilité, vie professionnelle et vie privée. 


“Je parle de l'équilibre, vie privée, vie personnelle, et en quoi le fait d'avoir les deux et de mener les deux de front permet d'être plus pertinente, d'avoir la prise de recul et d'être plus performante dans les deux environnements. Il reste encore, malheureusement, un regard social sur le fait qu'une femme qui réussit professionnellement, elle ne peut pas réussir personnellement. Ça reste encore parfois difficile de dire que non, on peut avoir une vie épanouie personnellement et épanouie professionnellement.”


L'interview est à écouter sur le podcast Le Pouvoir au Féminin – Alexandra Serizay, Ex-membre du COMEX de Sodexo – « Être directrice, c’est être enthousiaste »

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Merci Nelly de cette belle synthèse de nos échanges ! Que cela puisse aider toute directrice... et tout directeur !

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